La musique clair-obscur de Bleu Reine…

La musique clair-obscur de Bleu Reine…

Bleu Reine © Julia Swell – Films

Une musique qui nous plonge dans un « bel univers », à la croisée du grunge, de la folk et de la chanson française… Focus sur cette artiste à la « chanson française orageuse ».

De la musique classique à l’admiration pour les guitar heroes…

Durant sa plus tendre enfance, Léa Lotz (alias Bleu Reine) suit un parcours assez académique : les cours de piano classique et les leçons de formation musicale rythment son quotidien. Par chance, elle rencontre LA professeure qui lui provoque ce coup de foudre pour la musique. «  J’ai eu un bol monstrueux en tombant sur une prof qui avait tout compris de mon fonctionnement et qui m’a toujours proposé des pièces qui me plaisaient, m’intriguaient – et elle savait exactement quand m’encourager, quand me mettre au défi, et quand lever les yeux au ciel. Je lui dois la découverte quasi boulimique de plusieurs compositeurs, notamment ceux de la période romantique. »  

Après quelques années au piano, Léa commence la basse, alors âgée d’une douzaine d’années. Elle se joint à des groupes de métal, alternant la gratte au chœur.  « J’ai commencé la guitare en dernier : lorsque l’envie de chanter m’a prise plus sérieusement j’ai senti que c’était le bon instrument pour m’accompagner. Mon père est guitariste, on avait des guitares à la maison, je les lui piquais et je commençais aussi à jouer sur des guitares de potes dans de nouveaux groupes. »  La guitare se fusionne donc harmonieusement à la voix de la jeune artiste, l’éloignant peu à peu des « figures imposées du piano ». 

En effet, changer d’instrument permet à Léa de découvrir une nouvelle gamme de sons et de postures. « En grandissant je me passionnais pour des guitar heroes davantage que pour des keyboards heroes… A l’exception peut-être de John Paul Jones et de ma grand-mère (organiste) née en 1928. » Ses techniques en matière de jeu sont limitées mais ce « style bancal » propre à Léa rend sa musique atypique. Alors qu’elle se fait les griffes sur la gratte, Léa croise la route de Léonard Livert, avec qui elle forme un premier groupe. Encore aujourd’hui, Léonard est le batteur de Léa.

Underground Room par Diamond Bleach:

Le projet Diamond Bleach : un projet éphémère qui a fait naître « Bleu Reine »

En parlant de formation, un groupe aura marqué Léa Lotz : il s’agit de l’ancien projet Diamond Bleach, réalisé entre les années 2010 et 2017. Peu à peu, la productivité du groupe s’effiloche, Léa se rendant de moins en moins disponible du fait de ses études à l’étranger. Impossible donc pour la bande d’enrichir cette « ligne personnelle et cohérente sur ces tranches très espacées. » 

Malgré tout, cette première approche de la musique actuelle fraye un nouveau chemin dans l’esprit de Bleu Reine : celui de créer une musique plus « brute », abordant cette fois la langue française. « C’est un projet qui a pris forme pour des raisons musicales et humaines, il s’est terminé exactement pour les mêmes raisons. » C’est alors que se dessine le projet de « Bleu Reine », clin d’œil secondaire du féminin de la couleur « Bleu Roy »…

Entre 2017 et 2018, Bleu Reine réalise entretemps des concerts de reprises au Supersonic. Alors que le projet Diamond Bleach s’achève, l’artiste décide de se mettre sérieusement à l’écriture de ses chansons. Lors d’un dernier concert en tribute à Queen of the Stone Age en guitare-voix, elle se fait repérer par un tout jeune label. Léa sera en effet contactée par le label indépendant Sanit Mils Records (https://sanitmilsrecords.com/), et après discussion, la jeune chanteuse signera trois mois plus tard. Ce contrat permettra à Léa de se recentrer sur l’écriture, et d’accélérer l’enregistrement et plus tard sortir un premier EP en format vinyle et digital, début 2019. This Is Love de PJ

Harvey reprise par Bleu Reine :

Élémentaire, un premier EP

Le 28 juin 2018, Bleu Reine sort ex nihilo sur YouTube une reprise en session live du titre Das Model de Kraftwerk, cover qui a par ailleurs connu son petit succès auprès des webzines ! En effet, Bleu Reine alterne la langue de Goethe avec celle de Molière tout naturellement, le tout dans une atmosphère mélancolique, où le rêve se confond à la réalité. Léa déclare par ailleurs : « Avec cette session live „clipée” dans laquelle je n’apparais qu’au dernier moment, ça coïncide avec la transition de l’allemand au français, donc quelque part cette dynamique de dévoilement s’emboîtait bien. Et puis les paroles d’origine (un homme qui parle d’une femme) ont été également remaniées – la relecture n’est donc pas que musicale. Je trouvais ce parti pris intéressant, j’avais besoin de m’exprimer un maximum dans l’exercice de style qu’est la reprise. En tout cas il m’a fait avancer/connaître à pas de loup avant la sortie de mon premier single „Les Yeux fermés” un mois plus tard. »  

Le 18 janvier 2019, Léa réalise un premier EP intitulé Élémentaire, sorti chez le label indépendant Sanit Mils Records. L’opus est composé de cinq titres aux textes poétiques et personnels, à la croisée des contes pour enfants et du journal intime. Ses influences ? Plutôt changeantes ! « Difficile de parler d’inspiration ou d’influences, les deux ont tendance à se confondre quand on tente de dessiner les contours de son projet. C’est assez cyclique mais je dirais Anna Calvi, Françoiz Breut, 16 Horsepower, Michel Berger, Josh Homme… » 

Le « bel univers » qu’elle décrit dans son œuvre est clair-obscur : Bleu Reine semble chanter de sa voix à la fois intense et fragile à l’ombre de la pleine lune, accompagnée de sa guitare aux sons éthérés, oniriques… La musique de Bleu Reine se fait tantôt folk, tantôt rock, et flirte parfois avec le grunge. Malgré tout, Bleu Reine se questionne par rapport aux styles qu’elle aborde : « Il y a toujours trois choses : la musique qu’on veut faire, la musique qu’on pense faire, et celle que l’on fait vraiment… la vérité se situe sûrement à la croisée de ces trois définitions. Je voulais originellement faire de la folk teintée de grunge, je suis persuadée de faire de la chanson française orageuse, mais je fais probablement du rock français ? » 

Toujours est-il que Bleu Reine a de quoi nous faire frissonner et pour cause : « Je ne pense pas avoir un rôle de messager, éventuellement un rôle de vecteur ponctuel. À ce titre j’espère transmettre des émotions, déplacer quelques perspectives à mon niveau, au moins le temps d’un morceau. En fait j’espère que les gens trouvent en m’écoutant ce que je cherche moi-même en écoutant la musique des autres : quelque chose de suffisamment familier pour m’attirer, et de suffisamment singulier pour me faire rester. » En bref : Bleu Reine joue sur la corde sensible afin de nous plonger dans nos émotions. 

Das Model de Kraftwerk par Bleu Reine :

Inspirations et projections

Bleu Reine joue une musique qui part effectivement de l’instinct. Ça commence par une phrase, une sensation, une émotion à sortir… puis Léa travaille autour de cette base afin d’y donner une « chair ». Elle s’exprime par rapport à son processus créatif : « Je crois au jaillissement, je pense vraiment que toute bonne chanson part d’une idée forte, mais je pense qu’elle ne peut être mise en valeur que par la „phase 2” (digestion, dissection, exploration,…). Aussi bien sur le plan du texte que de la musique. » Depuis son premier EP, l’état d’esprit de la jeune femme évolue et elle sort de sa zone de confort sur le plan mélodique. Léa se fait exigeante sur son travail, qui se doit d’être le plus personnel possible : « Je ne cherche pas en premier lieu à faire des choses qui se retiennent, mais des choses qui me ressemblent. Je ne me satisfais pas facilement de ce que je fais – par moments c’est d’ailleurs un problème, à d’autres moments c’est une solution. »   Par rapport à ses projets, à la question « Y a-t-il des artistes avec lesquels tu aimerais collaborer ? », Bleu Reine répond : « Pour l’heure, bizarrement, je crois que ça m’exciterait davantage de collaborer avec des réalisateurs de films ou des plasticiens qu’avec d’autres musiciens – si on pense à des gens que j’admire. J’ai une vraie faim de musique à l’image, je prends mon temps mais j’aimerais mettre ce genre de projet en place dans les années à venir. »

À l’Autre Bout de Moi par Bleu Reine :

« Je rêve de jouer partout où je me sentirai attendue. »

Pendant l’année 2019, Bleu Reine organise plus de vingt-cinq concerts, « tous trouvés en DIY ». Une démarche qui peut coûter beaucoup d’énergie à la jeune chanteuse, mais qui lui tient à cœur. De sa petite chambre aux scènes parisiennes : le bond est tout de même conséquent ! « J’ai besoin de le faire exister par le live, quitte à me mettre dans des situations parfois inconfortables (conditions techniques, public…). » 

Après une petite pause en début d’année, Bleu Reine reprend progressivement le live. Le prochain concert ? Bleu Reine prépare un événement secret avec la chanteuse Léa Jacta Est, son « evil twin lynchienne ». Même si rien n’est annoncé officiellement pour le moment, Bleu Reine confesse : « On prépare quelque chose de très spécial qui mobilise notre application et notre second degré à parts égales. » Affaire à suivre… tout comme l’artiste !

Amicalement,

Alice

Les Yeux Fermés par Bleu Reine :

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